Entretenir une mare

 

Chaque mare est différente et possède son fonctionnement propre, évoluant plus ou moins rapidement, dans des directions pouvant être assez différentes d’une mare à l’autre, y compris au sein d’une même parcelle. Les jeunes mares sont souvent les moins stables : les proliférations d’algues sont fréquentes, puis le seront moins lorsqu’une communauté diversifiée de végétaux et petits animaux sera bien en place.

Les principaux paramètres justifiant un entretien sont : la prolifération de végétaux dans l’eau ou sur les rives, la présence excessive de vase, des défaillances de tenue de l’eau, la présence de polluants ou d’espèces indésirables. Les petits travaux d’entretien sont quelques fois nécessaires tous les ans, les plus gros tous les 3 à 20 ans.

L’entretien d’une mare se fait une fois que la plupart des espèces inféodées y ont réalisé leur reproduction et que les larves sont sorties de l’eau, c’est-à-dire après la fin août. On évitera de réaliser des opérations importantes après novembre, en particulier dans les régions où les hivers ne sont pas très prononcés. En effet, certaines espèces rejoignent les mares dès le mois de décembre alors que dans d’autres c’est à partir de mars.

Comme de nombreuses espèces restent toutefois présentes dans l’eau en automne et hiver, il est recommandé de faire des gros travaux d’entretiens (curage, reprofilage…) en deux ou trois temps, par moitié ou tiers sur deux ou trois ans, pour éviter un impact trop sévère.

Une mare ne se gère pas comme une piscine ! Il est exclu d’utiliser des produits de traitements (algicides, désinfectants, clarifiant etc…) !

 

Gestion de la végétation

Si la végétation aquatique est trop importante, une partie peut être extraite au râteau à la fin de l’été pour maintenir une zone en eau libre d’au moins un tiers de la surface totale. On placera les végétaux aquatiques extraits pendant une journée sur la rive de la mare : les multiples petits animaux qui y sont éventuellement prisonniers (insectes, amphibiens, mollusques…) pourront s’en extraire et rejoindre la mare. Ensuite les végétaux seront exportés loin de la mare. Attention cette opération est à éviter absolument au printemps : larves de tritons, de grenouilles, de mollusques ou d’insectes peuvent y être accrochées et seront alors détruites. Les lentilles d’eau, petites plantes flottantes très couvrantes, peuvent être récoltées avec un râteau ou une épuisette, par écrémage, en particulier si elles recouvrent totalement la mare. Concernant une éventuelle prolifération d’algues filamenteuses (type spirogyres), signe d’une mare trop riche en azote, un écrémage régulier peut être réalisé également si leur couverture est massive. La maitrise de la qualité de l’eau arrivant dans la mare est à envisager.

 

Ma mare est envahie d’algues. Que dois-je faire ?

Les tiges des hélophytes* peuvent être coupées (faucardage*) au ras de l’eau et exportées (ne pas les laisser se dégrader dans l’eau). Pour éviter une prolifération des hélophytes*, il est possible de disposer un tapis de cailloux ou de pierres par endroit.

Les jeunes pousses d’arbres (saules…) peuvent être arrachées au fur et à mesure de leur apparition. Des coupes d’éclaircie des arbres et arbustes installés sur les berges et à proximité permettent à la mare d’avoir plus de lumière et moins de feuilles mortes. Attention, les racines des arbres et arbustes permettent de fixer les berges et sont parfois des habitats de certaines espèces. A contrario, les racines pompent l’eau du sol et il arrive qu’elles percent les bâches ou les fines couches argileuses. Le bois coupé disposé au sol à quelques mètres de la mare sera utilisé par de nombreux animaux inféodés à la mare (gîte et abris, relais pour la migration…).

Attention aux tontes d’herbacées en juin autour des mares lorsque les très jeunes grenouilles et crapauds s’y éloignent après leurs métamorphoses.

 

Gestion des vases et curage

Si l’épaisseur de la vase dépasse 40 cm, un curage doux peut être envisagé. La vase est extraite à l’aide d’une pelle (à main préférentiellement ou mécanique) ou d’un outil de type baguernette*. Attention à ne pas percer la couche imperméable (argile ou bâche). Quelques centimètres de vase peuvent être gardés : de nombreux organismes y sont présents et la vase assure aussi une fonction de protection pour certains. Elle contient également la nourriture de certaines espèces. Un assèchement de la mare est une autre technique intéressante de gestion des vases : celles-ci sont minéralisées au contact de l’air et perdent alors leur volume. Il est ensuite bien plus facile d’en extraire une partie. Un assèchement automnal ou hivernal, tous les 3-5 ans permet une bonne maitrise des vases, comme des éventuels poissons. Elle a cependant quelques fois pour effet de faire germer des graines de massettes (Typha) qui peuvent alors proliférer.

Les vases étant très riches en matière organique, il vaut mieux éviter de les mettre sur les rives ou sur les écoulements d’eau alimentant la mare, sinon il y a un risque d’eutrophisation rapide. Elles peuvent en revanche enrichir les potagers et les cultures.

Un curage, en septembre-novembre, permet l’élimination des vases, un reprofilage des berges, voir un agrandissement de la mare. De préférence le curage ne sera pas total, mais partiel (1/3 ou ½ de la mare). La couche superficielle des sols humides peut contenir des organismes en dormance (graines, œufs, spores) et attendent la sortie de l’hiver ou une inondation pour se développer. Ce matériau est donc à conserver ou à réutiliser en cas d’étrépage*. Avant de commencer l’opération il faut définir les zones de régalage (voir règlementation).

 

Reprofilage

Une rupture des pentes des rives trop abruptes en basculant la crête du talus dans l’eau est une opération facile et utile : les graines sont conservées et la fragilité de la berge est écartée.

 

Elimination des espèces indésirables

Pour les végétaux, voir précédemment. Pour les poissons, une vidange peut être nécessaire, les captures à la senne ou à la nasse ne permettent souvent pas d’éliminer tous les poissons dans les mares assez grandes ou avec une couche importante de vase. Les hérons sont souvent des alliés utiles pour éliminer les poissons réfugiés dans peu d’eau.

Concernant les moustiques, une mare accueille tous les prédateurs naturels des larves de moustiques (libellules et autres insectes, amphibiens, crustacés, et même chauves-souris) au contraire des micro-points d’eaux stagnantes (arrosoirs, coupelles, vieux pneus, pots de fleurs…) qui en sont démunis. C’est dans ces derniers que les moustiques sont les plus nombreux et prolifèrent. Dans les mares les populations de moustiques sont donc contrôlées par les nombreux prédateurs qui maintiennent des effectifs faibles. Il a par ailleurs été montré que le moustique tigre affectionne les habitats artificiels et très peu les mares[2].

 

Turbidité et couleur de l’eau

Il est souvent difficile de contrôler efficacement la turbidité d’une mare. S’il s’agit de limons, identifier la cause (ruissèlement, fréquentation par des animaux…) permet d’identifier une éventuelle solution. Si l’eau est brune, il s’agit probablement de substances humiques, présentes naturellement dans les secteurs où dégradation de la matière organique du sol produit des substances s’écoulant dans la mare. Ce n’est donc pas une anomalie notable. En été il est courant de voir certaines mares devenir très vertes : ceci est lié au développement important l’algues unicellulaires ou filamenteuses favorisées par une eau riche en nutriment et chaude. Cette prolifération peut être une menace pour les espèces, en particulier lorsque cette matière organique se dégrade, entrainant une baisse en concentration d’oxygène de nuit, allant jusqu’à la mort des espèces animales aquatiques.

Attention : ne jamais utiliser de produits de traitement des piscines ! Seul un chaulage au carbonate de calcium peut être accepté pour stabiliser le pH dans le cas d’eau à trop faible pouvoir tampon. Cette opération est bénéfique globalement pour la qualité de l’eau et des vases et limitera dans certains cas la prolifération d’espèces induisant des déséquilibres néfastes à la biodiversité (bactéries, algues…).

 

 

[2] Voir un exemple en cliquant ici.

 

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