Petit héron, grande protection

Le blongios nain (Ixobrychus minutus) est un oiseau migrateur inféodé aux zones humides. Photo : Olivier Hépiègne

Le blongios nain, une espèce menacée en France Le blongios nain, plus petit héron européen, est une espèce menacée en France. Alors que ses effectifs semblent plus stables en Europe, cet oiseau d’eau migrateur voit sa population en fort déclin dans l’Hexagone. La raréfaction et la dégradation des zones humides contribuent à menacer son biotope. Des mesures conservatoires au niveau national ainsi que des actions menées à des échelles plus locales visent à stabiliser ses effectifs. Texte : Odile Bernard, administratrice de la SNPN, professeur agrégée de SVT, chargée d’éducation à l’environnement au Comité départemental de protection de la nature en Saône-et-Loire (CDPN 71) et membre de la Commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS). Texte publié initialement dans Le Courrier de la Nature n° 329, juillet-août 2021 Dans l’ordre des Pélécaniformes, parmi les 67 espèces de la famille des Ardéidés, (hérons, aigrettes, butors, crabiers…), le blongios nain (Ixobrychus minutus) est le plus petit héron européen. Grand cou, long bec en forme de poignard, longues pattes, il présente une silhouette d’échassier mais sa petite taille, celle d’un gros pigeon, rend peu probable une confusion avec une autre espèce. Ce héron nain ne mesure que 36 cm de hauteur, 50 cm d’envergure et pèse 120 g (à titre comparatif, le plus grand héron européen, le héron cendré Ardea cinerea, peut atteindre 98 cm de hauteur, une envergure de 1,95 m et un poids de 2 kg). C’est aussi la seule espèce de héron à présenter un dimorphisme sexuel au niveau de la couleur. Le mâle, capuchon noir, ailes noires à reflets verts, grande plaque claire sur le dessus de l’aile bien visible en vol, ventre jaune clair et flancs blancs, se distingue de la femelle, plus terne, calotte noire, dos brun et un ventre rayé brun et beige. Chez le mâle comme la femelle, le bec est jaune à pointe noire et l’iris de l’œil est jaune orangé. Le jeune blongios est plus sombre et moins contrasté que l’adulte, et son ventre est strié comme celui de la femelle. Lorsqu’il atteint l’âge adulte, vers 3 mois, il subit une mue complète qui en France dure de juin jusqu’à l’automne. La longévité maximale pour un individu de l’espèce, observée grâce aux données de baguage, est d’environ 6 ans. Un migrateur inféodé aux zones humides Le blongios nain est un oiseau d’eau migrateur. Il se reproduit en Europe, mais aussi en Asie, Afrique, Nouvelle-Zélande, Nouvelle- Guinée et en Australie. En France, l’espèce est inégalement répartie. Les départements ou régions qui montrent les effectifs nicheurs les plus importants sont le bassin de la Somme, le Gard et les Bouches- du-Rhône (en Camargue), l’Ain (la Dombes), les zones humides du Nord-Pas de-Calais, la Saône-et-Loire (le long de la Seille), la Côte d’Or (gravières), l’Indre (en Brenne), les étangs du Nord-Est (Lorraine, Champagne-Ardenne), le Forez, les étangs de la côte landaise, les étangs des Yvelines en Île-de-France, des étangs en Vienne et quelques zones humides de la région Rhône-Alpes. L’espèce est excessivement discrète, très active dans les roseaux et plutôt crépusculaire. Le mâle est plus facilement repérable au printemps, quand il patrouille d’un vol léger pour marquer en chantant son territoire et chasser les rivaux potentiels. Ce héron miniature édifie son nid dans les marais calcaires, les bords d’étangs, les lacs eutrophes ou certaines gravières. Il affectionne particulièrement les roselières, les phragmitaies, les saules taillés des berges de rivières où l’eau s’écoule lentement, pour sa plus grande quiétude. Dans ces milieux humides, il chasse à l’affût. Son alimentation est constituée pour un tiers d’insectes, de mollusques, de larves vivant dans les roseaux et pour deux tiers de poissons et d’amphibiens. Ce redoutable pêcheur utilise son bec comme une épée pour transpercer les poissons qui passent entre ses pattes. Les adultes et les jeunes des populations nicheuses françaises partent fin août vers l’Afrique sub-saharienne, en empruntant une route migratoire assez mal connue, sans doute italienne et orientale. Le mâle – monogame, territorial et pouvant vivre en solitaire – est le premier à revenir, vers la fin du mois d’avril ou le début du mois de mai. Il cherche alors un nid ancien ou démarre la construction d’un nouveau : il dépose le premier matériau et si la femelle accepte le projet, elle participe à l’édification. Constitué de roseaux, de brindilles et d’herbes, le nid en forme de pyramide inversée mesure, en fonction de l’environnement, 8 à 30 cm de hauteur pour un diamètre de 18 à 35 cm, édifié à une vingtaine de centimètres au-dessus de l’eau. Le mâle cherche à attirer la femelle par son chant (on entend une sorte de « ouorrr », roulé et rauque). L’accouplement a lieu dans le nid, début mai. La femelle pond quatre à six œufs blancs, qu’elle couve en alternance avec le mâle, pendant 14 à 16 jours. Lorsque les partenaires échangent leur place pour assurer l’incubation, ils adoptent un comportement hostile propre à l’espèce, tête relevée, bec ouvert, huppe redressée. Les petits, nourris par régurgitation des parents, d’abord dans le bec, puis dans le nid, essaient de quitter la plateforme vers l’âge de 6 jours, adoptent la posture raide et droite des parents à 10 jours alors qu’ils sont encore couverts de duvet, commencent à pêcher à un mois mais ne peuvent voler […]

Accès restreint

Ce contenu est réservé aux abonnés du magazine Courrier de la Nature

S'abonner au magazine  Se connecter

Contenus liés

Abonné
  • Dossier
Déc 2022

Qu’est-ce qu’une antilope ? Une même appellation pour une diversité d’espèces