Photo : Annelies Geneyn/Unsplash

Une histoire naturelle du sol à l’intention de ceux qui le piétinent

Marc-André Selosse

Actes Sud. 2021. 478 pages. 25 €.

Texte : Hervé Cubizolle

Texte publié initialement dans Le Courrier de la Nature n° 335, novembre-décembre 2022

Marc-André Selosse est incontestablement l’un des meilleurs spécialistes des sols tant à l’échelle nationale qu’internationale. Mais c’est aussi un remarquable pédagogue. Son dernier ouvrage, L’origine du monde, qui vise à expliquer au plus grand nombre le fonctionnement des sols, l’atteste.

La pédologie est une science ingrate, complexe et difficile à vulgariser. Les ouvrages en français sur les sols ne manquent pas mais très peu sont accessibles à un public autre que les étudiants, les enseignants et les gestionnaires. Marc-André Selosse a donc écrit le livre sur les sols qui manquait en langue française. La lecture est non seulement aisée mais elle est rendue très agréable par de multiples anecdotes, des exemples judicieusement choisis et souvent connectés à la vie quotidienne, des expériences simples à réaliser, et, enfin, une touche d’humour toujours bienvenue. À ce propos, soulignons la qualité et la pertinence des dessins d’Arnaud Rafaelian qui accompagnent le texte.

Professeur au Muséum national d’histoire naturelle de Paris, Marc-André Selosse est avant tout un spécialiste du vivant dans le sol, et de son évolution. L’ouvrage est donc centré sur la vie dans le sol : algues, champignons, bactéries, symbioses mycorhiziennes, parasitages, etc. Néanmoins, aucun aspect du fonctionnement du sol n’est oublié : interactions entre phase organique et phase minérale, vie souterraine de la plante à travers celle de son réseau racinaire, cycles de l’azote, du carbone, respiration, alimentation des plantes, altérations des sols du fait des usages pluri-millénaires qu’en font les sociétés humaines.

Marc-André Selosse, comme tous les pédologues, regrette que l’on s’intéresse si peu aux sols pourtant vitaux pour l’alimentation humaine. On estime que 30 à 50 % des surfaces de terres arables de la planète sont affectées par des problèmes d’érosion, de salinisation, de pollutions diverses, en particulier celles liées aux abus de pesticides. Enfin, des superficies considérables ont d’ores et déjà été enfouies sous le goudron ou le béton. Il est donc plus que temps de prendre conscience de l’importance des sols pour l’avenir de l’humanité. Cela passe bien sûr par des décisions fortes en termes de transformation de nos pratiques agricoles et de maîtrise de l’extension des zones urbaines. Mais cela suppose aussi un effort pédagogique considérable pour que l’opinion publique comprenne l’urgence qu’il y a à mieux respecter les sols et la vie qu’ils abritent, sans laquelle l’agriculture mondiale aura bien du mal à nourrir l’humanité.

 

L’Origine du monde. Ed. Actes Sud.

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