Botanique : Du nouveau pour le liseron de Durando en Algérie

Le liseron de Durando. Photo : Larbi Afoutni
Texte : Karim Haddad, ÉcoCirta, 

Larbi Afoutni, Institut des sciences vétérinaires, Université Frères Mentouri, Constantine, Algérie, 

Amar Saci

Texte publié initialement dans Le Courrier de la Nature n° 327, mars-avril 2021

Pendant les mois de mars et avril 2020, des explorations floristiques ont été organisées par l’association ÉcoCirta  afin d’étudier la répartition des espèces de plantes dans le nord-est algérien. Lors de ces sorties de terrain, les naturalistes ont fait une heureuse découverte : des spécimens de liseron de Durando (Convolvulus durandoi) [1] observés dans deux nouveaux sites encore non répertoriés. Cette plante endémique du nord-est de l’Algérie et du nord-ouest de la Tunisie est classée « en danger critique d’extinction » par l’Union internationale pour la conservation de la nature.

Une espèce rare et très localisée

Le liseron de Durando appartient à la famille des Convolvulacées – des plantes herbacées, la plupart du temps grimpantes ou rampantes aux tiges minces et volubiles et dont les fleurs sont évasées en entonnoir, blanches, bleues ou roses. Les terrains marécageux et les prairies humides sont les habitats naturels de l’espèce. Toute interaction humaine sur son habitat peut facilement détruire ce liseron et le faire disparaitre définitivement ; le défrichement et le drainage agricole représentent ainsi les principales menaces pesant sur l’espèce. En Algérie, elle est protégée depuis 2012.

Elle était considérée comme rare en Algérie et en Tunisie dans les flores classiques [2], [3]. Aujourd’hui, la principale sous-population historique de la plaine de Mitidja près d’Alger est considérée comme éteinte en raison de l’agriculture et de l’urbanisation intensives. D’autres emplacements (Skikda, Jijel et Abudid à Larbaa n’Ath Irathen) en Algérie sont considérés comme éventuellement perdus en raison de l’urbanisation et l’industrialisation des plaines. Les deuxièmes principaux sites historiques, près d’El Kala, ont également été partiellement détruits par l’agriculture et l’urbanisation, mais une petite population survit et devrait maintenant être théoriquement protégée par son inclusion dans le parc national d’El Kala créé en 1983. En Tunisie, la population de Sejnane a été détruite par le drainage pour l’agriculture. Actuellement, a surface occupée par l’espèce en Algérie et en Tunisie couvre au total entre 64 km² et 100 km².

Le liseron de Durando ne pousse que dans quelques sites au nord du Maghreb. Source : UICN, modifié par ÉcoCirta

Données récentes

Au cours d’une sortie naturaliste dans la région de Skikda en mars 2020, l’un des participants a observé un plant de liseron de Durando sur un nouveau site : près de Dem El Begrat, dans la wilaya de Skikda, au bord d’une piste non loin de la route et en lisière de forêt. En avril 2020, lors de journées d’explorations organisées par ÉcoCirta, les spécialistes ont à leur tour découvert deux nouvelles stations sur une prairie humide limitrophe entre les wilayas de Constantine et Skikda. Ce site est constitué par un terrain déboisé, pas trop dégradé et dense de végétation courte, qui ne semble pas pâturé.

À la lumière de ces nouvelles observations, l’association prévoit d’élargir ses explorations floristiques à d’autres sites de cette zone et au-delà. Les observations lors des sorties sur terrain des spécialistes et surtout des photographes amateurs permettent ainsi d’enrichir la carte de répartition géographique de cette plante en Algérie et en Tunisie.

Lieu de présence du liseron de Durando à Ain Bouziane. Photo : Karim Haddad

Nous devons un merci particulier à Errol Véra et Luciano Arcorace pour les conseils, les précieuses informations fournies et la confirmation de l’espèce.


Références

  1. Pomel A. 1874. Nouveaux matériaux pour la flore atlantique. Savy. 434 pp.
  2. Quézel P., Santa S. 1962-1963. Nouvelle flore de l'Algérie et des régions désertiques méridionales. CNRS. 1 170 pp.
  3. Pottier-Alapetite G. 1979-1981. Flore de la Tunisie (Angiospermes- Dicotyledones). Publications scientifiques tunisiennes, ministère de l'Enseignement supérieur et de la recherche scientifique, ministère de l'Agriculture. 1 190 pp.

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