En écologie, quel est l’âge de raison ?
La réaction de certains députés lors de la venue de la jeune Greta Thunberg (16 ans) dans les locaux de l’Assemblée nationale à Paris le 23 juin 2019 n’est pas passée inaperçue. Savoir que quelques-uns ont préféré “bouder” son intervention laisse un peu perplexe. Les membres de cette assemblée sont bien probablement dans les classes d’âge correspondant à celles des parents, voire des grands-parents de la jeune suédoise. On peut en déduire que le futur de la génération des lycéens et collégiens d’aujourd’hui se projette plus loin que celui de ces mêmes honorables parlementaires, surtout si leur horizon est bloqué aux prochaines échéances électorales. Cela change quand même pas mal le futur en question.
Or depuis quelques décennies, malgré les rapports successifs du Griec, de l’IPBES et d’autres groupes de travail affiliés ou non à l’ONU, il ne semble pas que les dirigeants de notre planète aient encore pris la mesure des enjeux. On comprend alors que les demandes de ceux qui ont moins de 20 ans, à tous ceux qui en ont le double et au-delà commencent à devenir de plus en pus pressantes. Quelle planète vont-ils recevoir en héritage?
Lors d’une succession, refuser un héritage jugé “toxique” est possible. Ici ce sera plus difficile. Pour illustrer, on peut d’ailleurs prendre le mot “toxique” au sens littéral du terme. On sait aussi qu’environ un million d’espèces animales en végétales sont menacées d’extinction prochaine et qu’à l’horizon 2070, il n’existera peut-être plus aucune population viable de mammifère ou d’oiseaux de plus de 10 kg à l’état sauvage dans la zone intertropicale. En ajoutant l’urgence climatique qui chapeaute le tout, on comprend qu’il existe bien quelques raisons d’interpeler les gouvernants. Qu’ont-ils fait?
Peut-on alors se tourner vers Machiavel présent dans une récente anthologie? Les trois manières classiques de gouverner seraient par les lois, par la force et par la ruse. Aux citoyens le respect des lois, au prince l’usage de la force ou de la ruse. Le choix pour le prince se situerait entre despotisme, cynisme, idéalisme (ni l’un ni l’autre) et réalisme (les deux). On peut constater que la morale ne figure pas dans ce schéma. L’écologie non plus. Au XXIe siècle, il faut vraiment changer de référentiel.
François Moutou, vice-président de la SNPN.