Courrier de la Nature n°334 septembre-octobre 2022

8.00 

Vulcain peut-il représenter l’avenir de notre monde ?

Durant ces dernières années la cause de la protection de la nature s’est heurtée à un certain nombre de blocages institutionnels et dans la gouvernance, avec une centralisation extrême de la décision, une influence très forte accordée aux lobbies productivistes et extractivistes, un manque de considération pour les corps intermédiaires et la concertation (dont les associations naturalistes et de protection de la nature et de l’environnement), un dévoiement des consultations publiques et des conventions citoyennes. La nature a souffert de ces méthodes et a continué de se dégrader.

« La politique que je mènerai dans les cinq ans à venir sera écologique ou ne sera pas », avons-nous entendu du Président entre les deux tours de l’élection présidentielle, le 16 avril 2022 à Marseille. Malheureusement un certain nombre de faits semblent démentir cet engagement. Par exemple, le ministre en charge de l’écologie et la secrétaire d’État en charge de la biodiversité occupent des rangs protocolaires nettement rétrogradés par rapport aux gouvernements précédents, avec des périmètres réduits.

Quel modèle philosophique nous propose-t-on pour résoudre la crise écologique qui s’accentue ? Vulcain (a)…

Soyons nets : le symbole ne nous convient pas du tout, et nous effraie même. Vulcain est le dieu du feu qui dévore et détruit : il est associé aux incendies, notamment estivaux. La plaine des Maures, la forêt de la Teste de Buch, pour ne citer qu’elles, ont trop souffert pour que l’on prenne ce sujet à la légère. Vulcain, assimilé à Héphaïstos, est le dieu du fer et de la forge, de l’industrie, en un mot, celui qui façonne la matière naturelle pour la transformer au profit exclusif des autres dieux et des humains, négligeant l’harmonie naturelle et l’existence des animaux et des plantes.

On nous invite ainsi à souscrire à une fuite en avant techniciste et productiviste : qui peut encore croire en une croissance infinie et en l’innovation technique comme la seule solution aux enjeux actuels et à venir ? Pourtant c’est bien ce que nous voyons se mettre en place actuellement, de façon accélérée, sur les questions énergétiques (éolien, photovoltaïque, nucléaire), sans débat démocratique et avec une singulière absence de questionnement en amont sur quelles énergies Pour quels besoins. La biodiversité sera, à nouveau, n’en doutons pas, la principale victime de cette vision archaïque de l’avenir, ne serait-ce que parce que l’on acte une régression environnementale en « simplifiant » les procédures au détriment des recours et des études d’impact.

Certes – évolution sémantique ô combien grinçante – le mot sobriété n’est plus moqué, mais à cet égard il semble que nombre de nos dirigeants « macronisent » : nouveau verbe qui signifie « se montrer inquiet d’une situation et énoncer de bonnes intentions, mais ne rien faire ». Avant on parlait de procrastination !

Rémi Luglia, président de la SNPN

a- « Certains avaient voulu me voir comme Jupiter, c’est plus Vulcain, c’est à dire à la forge », a déclaré Emmanuel Macron sur TF1 le 14 juillet 2022.


Dans les actualités :

Face aux bouleversements que subit la nature, comment l’humain doit-il réagir ? Les observations de terrain permettent d’apprécier les changements, comme l’arrivée en Europe d’une luciole sud-américaine (p. 8 à 10) ou la régénération des forêts tropicales humides (p. 11 à 13). S’il est parfois trop tard pour apporter une réponse, comme dans le cas des récents décès de mammifères marins dans la Seine (p. 14 à 15), des travaux peuvent contribuer à mieux comprendre pour mieux protéger : ainsi, un guide technique sur les champignons (p. 16 à 18), un colloque sur la coexistence entre humains et sangliers (p. 19 à 20) ou encore une conférence sur la notion d’Anthropocène (p. 21 à 22). Ces réflexions sur les rapports entre l’humain et la nature, au cœur du métier de gestionnaire d’espace naturel, sont très présentes à la SNPN, nouveau gestionnaire de la Réserve naturelle de la plaine des Maures (p. 23 à 24).

 

Vie de la SNPN


Dossier : Le petit monde des rats à trompe : les macroscélides, mammifères méconnus

Par François Moutou

L’Afrique est justement réputée pour sa grande faune, mais il ne faut pas sous-estimer la richesse, l’originalité et l’intérêt de ses petits mammifères. Les sengis, ou rats à trompe, réunis dans l’ordre des macroscélides, en représentent une belle illustration. Découvrons leurs origines, leurs descriptions et leurs modes de vie.


Dossier : Le parc naturel du Gorongosa : une renaissance au Mozambique

Par Alexandre Caron

Mis à mal par la guerre civile, le braconnage et l’abattage massif des gros mammifères, le Parc naturel du Gorongosa renaît aujourd’hui de ses cendres grâce au Gorongosa Restoration Project, un ambitieux programme de conservation et de protection qui tient également compte des populations humaines avoisinantes. Ce projet particulièrement innovant a pour objectif de développer son champ d’action jusqu’à l’océan Indien.

Point de vue : Pour une démocratie de l’eau, entretien avec Frédéric Denhez

Par Frédéric Denhez et François Moutou

L’été 2022 nous a confrontés encore, et violemment, aux incendies et à la sécheresse sur notre propre Terre. Comme tous les records, les minimums de pluviométrie enregistrés en juillet et en août sont faits pour être battus, ce qui n’est pas de bon augure pour les années et les décennies à venir. Que peut donc, et que doit donc, nous enseigner cette évolution spectaculaire de la disponibilité en eau sur notre territoire ?


L’art et la nature selon Félix Ziem et Jean Aicart


À lire 

Description

Ce nouveau numéro du Courrier de la Nature nous transporte au Mozambique dans le parc naturel du Gorongosa. On découvrira également de curieux petits mammifères africains, les macroscélides, surnommés « rats à trompe ». Face aux changements climatiques en cours, comment gérer la ressource en eau ? Le « point de vue » de ce numéro offre des éléments de réponse. Enfin, les dernières nouvelles de la conservation de la nature, les actualités de la SNPN, des conseils de lecture et des regards artistiques complètent le sommaire.

 

Découvrez un extrait du numéro :

Informations complémentaires

Poids 160 g