Courrier de la Nature n°332 janvier-février 2022

8.00 

La page blanche

Les jours commencent à rallonger mais l’hiver est toujours là. Nous avançons peu à peu dans la nouvelle année, quand tellement de belles choses semblent encore possibles. On peut imaginer ces mois à venir comme une campagne toujours couverte de neige poudreuse, encore immaculée. C’est idéal pour aller lire la nature sur la page blanche posée à terre.

Les activités humaines reprennent, mais patience ! Pourquoi ne pas laisser d’abord les habitants des bois et des champs parapher ce beau livre ouvert sur un nouveau cycle ? Chacun peut y laisser sa trace et y déposer ses voeux. Ce drôle de grand Y, c’est le lièvre qui l’a imprimé, là. Sa voie est assez facilement reconnaissable. Pas très loin, la piste du renard ne le concerne vraiment pas.

C’est d’ailleurs peut-être lui qui suivait le petit canidé roux. La piste régulière des petites pattes débouche soudain un curieux cratère dans la neige. Le renard a sans doute capté le bruit des activités champêtres d’un campagnol étourdi, trop sûr de lui sous le manteau neigeux. Le rongeur aurait dû se méfier davantage. Caché des yeux peut-être, mais pas des oreilles du rusé goupil. Et là-bas, près du bois, le chevreuil avance lentement en levant haut ses pattes à chaque pas, tout en humant l’air vif et froid, les oreilles en mouvement.

La renaissance printanière de la nature est proche. Souhaitons alors que nous puissions partager cette belle saison à venir, entre nous humains mais aussi avec tous ces non-humains qui nous entourent et qui partagent ces mêmes paysages : cette campagne, la forêt au-delà et la montagne encore plus loin, sans oublier la zone humide voisine et la rivière qui coule vers le rivage marin. Il n’y a pas que les mammifères bien sûr, il y a encore tous ceux qui ne savent pas écrire sur le manteau de neige, cachés en hibernation ou partis au loin en hivernage, ou alors peut-être seulement présents sous la forme d’une précieuse ponte, déposée bien à l’abri et dans laquelle repose l’espoir de la génération future.

Si nous voulons rédiger ensemble le récit à venir de la nouvelle année, de ces rencontres, de ces observations, de ces couleurs, sons et odeurs encore à imaginer pour certains, alors donnons-leur l’espace et la tranquillité dont ils ont tous besoin. Si nous protégeons la nature, ce n’est pas pour la consommer ensuite à notre guise, mais bien pour lui laisser la possibilité de continuer à écrire sa propre histoire, dans la neige et au-delà.

François Moutou, vice président de la SNPN


Dans les actualités :

En République démocratique du Congo, l’association P-WAC se porte au secours des chimpanzés victimes du braconnage. En Provence-Alpes-Côte-d’Azur, dans la steppe de la Crau, ce sont des fourmis réintroduites par des scientifiques qui contribuent à restaurer ce site touché par une pollution industrielle. Des études génétiques menées sur des condors de Californie révèlent des surprises. Au sein de l’Union européenne, la nouvelle réglementation relative à l’agriculture biologique est entrée en vigueur le 1er janvier 2022. Pour faire progresser la compréhension et les réflexions sur la protection de la nature, colloques et conférences se succèdent : une rencontre revient sur 30 ans de politique Espaces naturels sensibles dans la Nièvre ; une seconde explore l’histoire naturelle de la violence.

 

Vie de la SNPN


Dossier : Le chabot du Lez. Un petit poisson endémique en danger critique d’extinction

Par Stéphane Lefebvre, Vincent Sablain, Arnaud Corbarieu

Le fleuve Lez, dans l’Hérault, abrite sur quelques kilomètres seulement un petit poisson carnivore endémique, le chabot du Lez. Cette espèce ultra-localisée pâtit de la dégradation de son habitat aquatique, causée par les activités humaines.


Dossier : Un (gros) saut dans l’inconnuInventaires scientifiques dans le Parc amazonien de Guyane

Par Stéphanie Bouillaguet

Couverte à 90 % par une forêt tropicale humide, la Guyane abrite encore des zones inexplorées. Afin d’améliorer la connaissance à l’échelle du territoire, des missions d’inventaires naturalistes sont régulièrement organisées par le Parc amazonien de Guyane (parc national), en partenariat avec le monde scientifique. La dernière en date s’est déroulée sur le site de Gros Saut, sur la rivière Grand Abounami (commune de Papaïchton, centre-ouest de la Guyane).


Point de vue : Le loup en France. Plaidoyer pour une place aux grands prédateurs

Par Pierre Jouventin, François Moutou, François Ramade

Quelle place accorder aux grands prédateurs dans notre société humaine et dans nos paysages fortement anthropisés ? Ce sujet qui revient régulièrement sur le devant de la scène nationale – que ce soit à la faveur d’une observation de loup dans un nouveau département ou bien, plus tristement, d’une confrontation malheureuse entre ours et humains dans les Pyrénées – est cher à la Société nationale de protection de la nature. C’est pourquoi, après notre entretien avec l’éthologue Pierre Jouventin à l’occasion de la parution de son dernier ouvrage consacré au loup (cf. n° 329, p. 41 à 45), Le Courrier de la Nature a souhaité apporter un complément d’analyse sur ce sujet.


L’art et la nature selon Adèle Harrer et Chiyo-Ni


À lire 

Description

En couverture de ce nouveau numéro, un boa arc-en-ciel nous invite dans le Parc amazonien de Guyane : les scientifiques de la mission Gros Saut racontent péripéties et découvertes vécues sur ce site jusqu’alors quasi-inexploré. Le second dossier est consacré au chabot du Lez ; ce petit poisson localisé sur quelques kilomètres seulement du fleuve Lez, dans l’Hérault, fait l’objet de suivis attentifs. Ce numéro revient également sur la cohabitation avec le loup en France à travers plusieurs textes. Les actualités de la conservation de la biodiversité, de la réglementation environnementale, de la recherche scientifique et des actions de la SNPN complètent ce numéro, sans oublier les analyses d’ouvrages et les pages artistiques.

 

Découvrez un extrait du numéro :

Informations complémentaires

Poids 160 g