Apprendre à apprendre
Les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) se suivent, ceux de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), mise en place plus récemment pour la biodiversité, arrivent en alternance, mais peut-on parler pour autant d’une prise de conscience, et par qui ? Certes, ces documents sont denses, techniques, mais ils sont accompagnés de plusieurs types de résumés, dont l’un destiné aux décideurs, qui devraient aider à leur compréhension.
Aujourd’hui le schéma est assez curieux : le changement climatique d’un côté, comme la perte de la biodiversité de l’autre, semblent de moins en moins remis en cause, mais au niveau décisionnel planétaire, comme national et local, cela ne semble pas changer grand-chose. Face aux sinistres naturels en série et aux assurances qui bientôt ne pourront plus suivre, certains discours passent pourtant désormais nettement moins bien. Sous couvert d’éviter l’« écologie punitive », aucune décision n’est prise dans le sens d’une adaptation aux changements environnementaux pourtant inévitables. Mais qui peut entendre cet argument quand pour la troisième fois en quelques années sa maison est envahie d’un mètre d’eau (sale) ? Qui est alors puni, et par qui ?
On parle de plus en plus de la nécessité de formation à la biologie, aux sciences de la vie, au collège et au lycée, au moment où les sciences de la vie et de la terre (SVT) régressent de manière dramatique dans les programmes de l’Éducation nationale. Réparer ce manque est tout le combat de la fédération Biogée (nommée d’après un terme proposé par le philosophe Michel Serres). Le plus frappant dans ce contexte est surtout de constater l’incurie des dirigeants dans ces domaines. Il sera essentiel que ce qui remplacera peu ou prou l’École nationale d’administration (ENA) forme sérieusement les futurs hauts fonctionnaires aux fondements de l’écologie scientifique, la vraie, c’est-à-dire à l’étude des relations des êtres vivants entre eux et avec leur milieu. Cela s’applique également aux humains pour lesquels le seul lobby acceptable car universel est celui de la vie.
François Moutou
Dans les actualités :
Certaines informations font du bien : réintroduit depuis 7 ans dans les Pyrénées françaises, le bouquetin ibérique s’y porte bien (p. 8 à 11). Ces bonnes nouvelles ne doivent pas occulter le fait que les dommages causés aux écosystèmes par les activités humaines se poursuivent. Ainsi une récente étude montre que la surpêche conduit à une diminution de la taille des poissons (p. 12 à 13). Des chercheurs s’intéressent à la pollution olfactive et à ses conséquences sur le vivant (p. 14 à 16) tandis que d’autres scientifiques tentent de prévoir comment les extinctions d’espèces affecteront le fonctionnement des écosystèmes (p. 17 à 19). Face à ces enjeux, attention aux fausses bonnes idées ! Le capital sympathie d’une espèce peut avoir des effets contreproductifs pour sa préservation (p. 20 à 21), tout comme certains concepts commerciaux en faveur des abeilles sauvages (p. 22 à 23).
Vie de la SNPN
Dossier : Le retour de l’ibis chauve, réintroduction dans le sud de l’Espagne
Par Miguel A. Quevedo Muñoz, Pierre Gay
La réintroduction d’animaux nés en parcs zoologiques peut être un outil pour aider une espèce en danger d’extinction. Les programmes européens d’élevage d’espèces menacées (EEP) de l’Association européenne des zoos et aquariums (EAZA) ont ainsi permis dans la dernière décennie de réintroduire dans leurs aires de distribution historique des animaux nés ex-situ, comme l’ibis chauve (Geronticus eremita) en Espagne.
Dossier : L’écocomplexe de Païolive, haut-lieu de la biodiversité méditerranéenne
Par Patrick Blandin, Henri-Pierre Aberlenc, Corinne Bauvet, Alain Bertrand, Nicolas Bianchin, Jean-François Holtof, Vincent Hugonnot, Maurice Lhomme, François Schwaab, association Païolive
Le Vivarais méridional, au sud du département de l’Ardèche, possède un patrimoine exceptionnel : la réserve naturelle des gorges de l’Ardèche, la grotte Chauvet, les Cévennes septentrionales et le site de Païolive, qui correspond à un ensemble géologique et écologique original d’environ 150 km². La flore et la faune y sont très riches et les traces de la Préhistoire y abondent. C’est une région touristique prisée, et la découverte de la grotte Chauvet en a décuplé la réputation. Rien d’étonnant à ce que les enjeux de conservation des patrimoines naturels et culturels y soient particulièrement forts.
Point de vue : Retour sur le cas du chlordécone aux Antilles, un exemple de dérogations aux conséquences calamiteuses
Par François Ramade
Mis en cause dans l’effondrement des populations d’insectes pollinisateurs, les produits phytopharmaceutiques contenant des néonicotinoïdes sont interdits en France depuis 2018. Mais fin 2020, une nouvelle loi a été promulguée qui autorise leur usage à titre dérogatoire dans les cultures de betteraves sucrières. Ce n’est pas la première fois que des dérogations affaiblissent une législation visant pourtant à protéger l’environnement et la santé humaine. L’histoire du chlordécone dans les Antilles françaises le rappelle de manière édifiante.
L’art et la nature selon Alicia Pénicaud et Anna de Noailles
À lire