Choisir avec soin son emplacement
Choisir avec attention, sans se précipiter, un emplacement pour créer une mare est une étape essentielle. Prendre le temps d’observer le terrain, la topographie, les plantes présentes, la nature du sol, les milieux alentours, permettra de déterminer l’endroit le plus favorable qui aura les caractéristiques nécessaires pour assurer un bon fonctionnement, un résultat satisfaisant, et pérenne. Il est d’ailleurs peut être plus astucieux et plus simple de réhabiliter une ancienne mare qui aurait été comblée[1] !
Identifier les usages humains du site, envisager leur compatibilité avec la présence d’une mare est un préalable pouvant éviter des conflits futurs avec le voisinage.
Quel sera le fonctionnement à venir de la mare ?
Avant de sortir les pelles (ou la pelleteuse), il faut avoir une idée la plus précise possible du fonctionnement à venir de la mare, en premier lieu concernant son alimentation en eau.
Il existe plusieurs possibilités d’alimenter une mare en eau[2] :
- Par les précipitations directes (impluvium*) et/ou indirectes (ruissellement)
- Par des eaux souterraines (nappe phréatique* ou résurgences*)
- Par des débordements de rivières (crue)
- Par des collecteurs (fossé, tuyau) depuis des sources diverses (toitures, eaux de ruissellement…)
Le fonctionnement hydrologique* est donc à anticiper, car il en dépendra plusieurs décisions : emplacement, taille de la mare, profil des rives, besoin d’un système de surverse*, nécessité d’imperméabilisation…
L’emplacement idéal
Classiquement sont choisis les points bas de terrain (pour récolter efficacement les eaux de ruissellement) et les sites à pentes moindre (pour limiter les travaux de talutage* et d’endigage*). Mais aussi les zones de résurgence*, celles où une nappe souterraine est proche, ainsi que celles où des loupes argileuses* sont présentes en profondeur et permettent d’assurer une retenue durable de l’eau. Les endroits gorgés d’eau en hiver sont probablement de bons sites pour creuser une mare. Si le sol n’est pas perméable et que l’eau s’y infiltre trop vite (sables…), alors il peut être nécessaire de prévoir une étanchéification (apport d’argile*, de bentonite, bâche en caoutchoucs EPDM (Ethylène-Propylène-Diène Monomère) béton maigre sur bâche ou bassin bétonné…). Mais créer une mare temporaire, s’asséchant chaque été peut aussi être un objectif. En effet ce type de mare a un intérêt majeur pour une faune et une flore particulière, en particulier certains amphibiens*[3].
Une mare qui s’assèche, est-ce un problème ?
Quelle sera la caractéristique de ma mare ?
Il est particulièrement intéressant d’envisager une mare dans un réseau de mares interconnectées, en particulier en organisant la circulation de l’eau de ruissellement, qui passerait de l’une à l’autre, avec par exemple une fonction en amont de mare tampon. La présence d’autres mares préexistantes peut aussi être un argument pour choisir l’emplacement d’une nouvelle mare, et ainsi renforcer ou rétablir un réseau, facilitant notamment la colonisation naturelle de la nouvelle mare par la flore et la faune typiques de ces milieux.
Une mare peut être un abreuvoir pour le bétail ou la grande faune (cervidés) et des aménagements spécifiques peuvent être profitables pour éviter l’exposition directe aux déjections et au piétinement (clôture partielle, pompe à museau*…).
Une mare, lieu de vie de nombreuses espèces
La mare va être un lieu de vie de nombreuses espèces sauvages. Celles-ci dépendront souvent des habitats disponibles à proximité. Par exemple les amphibiens* ne fréquentent les mares qu’au moment de la reproduction, de façon très temporaire pour certaines espèces, ou plus longtemps pour d’autres. Une fois les larves métamorphosées, celle-ci quitteront la mare pendant 2 à 3 ans, vivant alors dans les forêts, les haies, les prairies alentours, souvent à quelques centaines de mètres, rarement à plus d’un kilomètre. Il est donc pertinent d’envisager la mare dans son contexte écologique plus large, en particulier en se souciant de la mortalité possible sur les routes présentes entre la mare et le boisement le plus proche, mais aussi de la possibilité de déplacements des petites espèces terrestres. Placer une mare non loin d’une haie, d’un talus de pierres sèches, d’une friche, d’un boisement, de terrains non cultivés permettra à de nombreuses espèces d‘y trouver des zones refuges essentielles. A contrario murs, murets, bordures verticales (type trottoir ou bordure de jardin) peuvent former de véritables barrières au déplacement, voir des pièges pour certaines espèces qui ne pourront les franchir. Si de telles installations sont présentes ou envisagées, leurs effets néfastes peuvent être neutralisés par les aménagements souvent simples (ouverture au niveau du sol, petites rampes, inclinaison des trottoirs…).
Il est conseillé de prévoir une zone tampon entre la mare et les zones agricole cultivées, et éviter les ruissellements directs, souvent trop riches en nutriments et contenant des pesticides. Une bande enherbée de quelques mètres ou une haie capturera les nutriments et certains produits phytosanitaires. D’une manière générale, prévoyez des espaces terrestres naturels végétalisés autour de la mare.
Trouver le juste équilibre entre l’ombre et la lumière
Une mare bénéficiant d’un ensoleillement au moins partiel verra un développement convenable de la flore aquatique et des rives, ce qui offrira des habitats intéressants pour la faune. Une mare en permanence à l’ombre restera froide, avec un herbier* réduit ou absent et une activité biologique moindre. Par ailleurs la présence d’arbres à proximité pourra être une cause d’apport excessif de feuilles mortes et favorisera le comblement de la mare. Mais une mare de faible profondeur avec une alimentation en eau de faible importance présente un risque d’assèchement plus rapide si elle est fortement exposée au soleil : dans ce cas, l’ombrage peut être positif.
La présence d’éclairage nocturne constant est également un facteur de perturbation des espèces : on évitera donc de créer une mare sous la lumière d’un lampadaire urbain ou un éclairage de jardin.
Points de vigilance
Si vous souhaitez créer une mare, nous vous recommandons de faire attention :
- A la réglementation (voir la fiche dédiée), en particulier les distances aux habitations et aux points d’eau (puits, captages…) ou ruisseaux/rivières
- A respecter la propriété privée (et à prévenir vos voisins de votre intention)
- A penser, le cas échéant, à la sécurité des enfants en bas âge
- Aux espèces protégées présentes (en particulier dans les zones humides)
- A ne pas dégrader les zones humides, même indirectement (drainage, remblais, tassement des sols…)
- A ne pas creuser dans une tourbière
- A ne pas détruire d’ornières ou petites zones inondées anciennes (souvent site de reproduction d’amphibiens*)
- Aux contaminations possibles par des produits phytosanitaires et/ou matière organique et/ou sels de déneigement/huiles depuis les parcelles proches (agriculture, routes…)
- A la dissémination d’espèces exotiques envahissantes* : identifier leur présence[3] et éviter les travaux sans précautions dans les zones envahies. Ne pas exporter des terres contaminées.
- A anticiper les accès pour les engins de chantier, pour ne pas abimer les sols, dégrader des zones humides ou des habitats d’espèces protégées.
- A définir la zone de régalage* des déblais, en estimant leurs volumes
- Faire un plan et marquer le terrain (piquetage) est très utile pour faciliter la réflexion et expliquer son projet
L’emplacement de cette mare, creusée il y a quelques années, a été choisi en fonction de la topographie et de la présence d’eau dans le sol.
Elle ne s’est jamais asséchée.
Photo C. Eggert
[1] Une consultation du site https://remonterletemps.ign.fr/ permet de visualiser des photographies aériennes anciennes, de même que de nombreuses cartes historiques. Voir aussi les inventaires régionaux.
[2] Attention à la réglementation. La dérivation de cours d’eau ou la proximité avec des captages est par exemple réglementée. Il est interdit également de déverser des eaux usées dans une mare, même nouvelle.
[3] Pour trouver des informations sur ce sujet, voir le centre de ressources espèces exotiques envahissantes : especes-exotiques-envahissantes.fr
Retrouvez toutes les descriptions des mots avec un “*” dans le glossaire.